Regarde la télé avec Lomig - Les Années Fac

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Inaugurons une nouvelle section de ces formidables articles dont je régale petits et grands, et commençons du coup, fort.

C’est le premier janvier, et officiellement, nous avons commencé le premier (et sans aucun doute dernier) Zapping de l’année. Je m’attendais à devoir affronter quinze rétrospectives concernant les instants les plus drolatiques d’émissions minables, ou encore les bons vieux gags vidéos sortis des archives de Youtube quand ce n’est pas de celles de feu Bernard Montiel, mais que nenni! Cette année, la palme revient donc à AB1, qui courageusement a obtenu les droits d’AB Production pour diffuser en boucle des épisodes des Unités de Programme Familiaux Dorothée.

Le monde est raciste. Le monde est sexiste. Même en (2013) 2014! Mais maintenant, moi, je sais pourquoi! C’est tout de la faute de Dorothée. Et des programmes familiaux vendus en unités. Je vais donc vous raconter ma folle escapade télévisuelle du début de l’après-midi/ Accrochez-vous, c’est compliqué et – sans doute – spirituel.

Situation initiale

Virginie (photo ci-contre), la cousine de Justine, est avec Luc. Sauf que dans un épisode précédent, elle semble avoir découché pour passer du temps avec Serge. Mais elle n’a rien fait! En effet, celui-ci n’a fait que lui déclamer de la poésie écrite en honneur de sa divinitude. Bon, dans n’importe quelle histoire, nous saurions que c’est parfaitement irréaliste et faux. « Je te jure, on a fait que lire la poésie qu’il écrit sur moi tellement il me vénère! »… Oui, oui, c’est intéressant… Cependant, nous sommes ici dans la suite (les acteurs vieillissent, les téléspectateurs aussi) de Premiers Baisers, et par le fait, dans une série AB Production. C’est donc ici parfaitement vrai et ça ne choque personne. « Comme c’est romantique! » s’exclament Souci et Suçon (photo suivante), les deux jumelles promues serveuse de leur cafète - quartier général (On a de l’ambition, ou on n’en a pas). Romantique, peut-être, mais Virginie, elle est avec Luc!

Bon, sans doute mon côté mâle (« De toute façon, ces filles, toutes des salopes! »), mais je dois avouer être poussé par un élan de sympathie envers le pauvre Luc! N’est-il pas embarrassant de découcher pour passer du temps avec un fervent admirateur et se faire écrire des vers qui, s’ils sont au niveau des dialogues de cette série, doivent figurer en pôle position des textes les plus dignes de la littérature vogonne?

Les épisodes

Le grand doute

Alors que Virginie raconte ses folles aventures (boooooooring) à sa cousine (photo) et aux jumelles plutôt qu’aller à la fac, elle n’a toujours pas revu Luc, elle doute. Ses amies, en dehors de ces dépravées clonées australiennes, trouvent cela très mal. Déjà, Virginie n’a pas le droit de sortir sans l’accord de Luc, il faut qu’elle aille s’excuser. En plus, ils sont voués à vivre ensemble, hein, donc tout acte visant à s’écarter de lui est un geste impur. Virginie se résigne face à la logique imparable de l’argument. Nous n’entendons pas « Independant Women » des Destiny’s Child en fond sonore.

De son côté, Luc, n’ayant pas accepté que Virginie puisse avoir une vie indépendante de lui, décide que tout est fini. Il cède alors aux avances de Corinne, et ceux-ci couchent ensemble. Je vous suggère de faire attention quand vous ratez le dernier RER, les enfants, parce que si vous ne pointez pas sur le relevé de présence de votre amoureux, vous allez au devant de GROS problèmes. Pendant ce temps, Caution-comique (c’est le nom du personnage non? Nerd-attitude, des vêtements bariolés, des bretelles et appelé par tous ‘Aristide’, c’est bien cela?) s’étrangle sous une barre trop lourdement chargée à la salle de sport, et se fait redresser le dos par un des coachs présent. Sa petite amie (Caution-comique de Premier Baiser) tente alors de le défendre, croyant qu’on tente de le tuer. Alors qu’en fait, c’est (Mozart) moi qu’on assassine!

Une fois l’acte accompli entre Corinne et Luc, celle-ci lui demande pourquoi il a mis temps de temps à sortir avec elle, et lui reste sombre, car, il pense à Virginie! « Sortir avec elle », donc, nus ensemble dans un lit. C’est trash, comme série, ça. Mais pas le temps de se poser plus de question, car le rythme trépidant de la série fait s’enchainer les scènes lourdes d’action! En effet, sonne à la porte Figurant, le copain de Corinne; dans un grand hommage que Marivaux ne renierait pas! Il attendra ici son aimée (ne me demandez pas pourquoi), empêchant ainsi toute tentative de le faire partir pour que la nymphe présente dans la chambre puisse quitter les lieux discrètement. Nous assistons alors à un jeu d’acteur digne des plus grands du cours Florent, et je me demande encore si l’acteur joue super bien le personnage qui ne sait pas mentir, ou si le personnage est super bien menti par un acteur qui ne sait pas jouer. Corinne sort donc de la chambre habillée, et trouve le meilleur prétexte du monde…. Elle faisait le ménage! Mais oui! Habillée en tailleur, dans un appartement non rangé (« j’ai commencé par la chambre, justifiera-t-elle ») ne lui appartenant pas (« ils m’ont tellement rendu service, alors je fais cela depuis deux semaines pour les remercier »), alors que le beau propriétaire est au même endroit, l’air gêné, nu sous une robe de chambre, alors qu’il devrait être au travail… Figurant accepte l’explication parfaitement raisonnable sans broncher, et ils s’en vont! Anthony (colocataire de Luc, copain de Justine, suivez un peu!) dit alors à Luc qu’il a vu Virginie, et qu’elle ne l’a pas trompé, et qu’elle veut le voir. CLIFFHANGER. Enfin, si on peut dire, parce que j’ai regardé un truc se résumant à « Virginie a passé la nuit chez un ami gay, Luc la trompe pour se venger car c’est un gros con qui ne tient pas à elle, fin. »

Le pardon

Justine prépare le petit déjeuner. Laïus avec Virginie à propos du fait qu’elle se doit de retourner avec Luc, l’autre n’étant pas pour elle. Le Serge en question dort dans le couloir derrière la porte d’entrée, tel un chien de garde. Tout va bien, puisque les gens en rient! Virginie, devant ce discours osé, comprend donc qu’un mec qui ne lui saute pas dessus dès le premier soir, beau, bien habillé, intelligent, friqué, prêt à tout pour la protéger de son ex-qui-n’en-est-pas-un, ne peut pas être pour elle, et elle file donc chez Luc (con, infidèle, violent et prof de tennis minable) pour s’excuser d’avoir des amis sans son autorisation.

Lors de l’explication, Luc tire la tête, ce qui fait tiquer Virginie; « Tu n’as pas l’air d’apprécier le fait que je n’ai pas couché avec lui! », perspicace-t-elle! (J’invente des verbes si je veux). Marivaudage, sonnerie de porte, voici Corinne! « Hey, un jour l’une, un jour l’autre! Je comprends pourquoi tu es tant attaché à lui, Virginie, vu comment il fait super bien l’amour! On l’a fait comme des bêtes hier. Bisous bisous! » Devant tant d’infamie, Virginie se barre en courant se réfugier auprès de ses amies pour un peu de réconfort. Volée de bois vert, plutôt! Il faut qu’elle pardonne à Luc, parce que, tu comprends, il était pas bien sans elle. Et puis ils sont fait pour être ensemble. Et il souffre. C’est de sa faute à elle, elle devrait arrêter l’hystérie, et s’excuser, et revenir auprès de lui. On lui ressasse ce discours dans 4 scènes différentes. Par TOUS les personnages féminins comme masculins. Bien entendu, à ce niveau-là, ce n’est plus de l’incrédulité que je ressens. Je me remémore ce temps ou un homme pouvait tromper sa femme ou en épouser une autre, mais que la femme en question se faisait répudier au mieux, ou caillasser/décapiter au pire, si jamais elle levait les yeux sur l’Étranger.

Mais Virginie n’est pas de ce bois. Virginie est une suffragette. Virginie décide donc d’inviter Serge chez elle et lui ordonne de l’embrasser et de lui faire l’amour. Alors là, je m’insurge, car elle va trop loin. Si vous vous rappelez bien, Corinne et Luc sont « sortis ensemble » quand Virginie veut « faire l’amour ». Salope. Lui, c’est l’homme, il joue, elle, c’est une salope qui couche. Serge, qui est, je le rappelle, poète, beau, bien habillé, riche et chaste – gay à la sauce AB, donc – refuse, mais Virginie l’embrasse de force alors que la porte de l’appartement est défoncée par Luc, soutenu par les amies de Virginie, pour casser la gueule de Serge. C’est bien entendu Caution-comique qui se ramasse les balles perdues, et je ne comprends toujours pas pourquoi Justine n’a pas ouvert avec ses clefs alors qu’elle était présente.

Tout le monde va se soigner dans la cafète (oui, c’est logique, chut.) et les filles à péd…. les cruch… les jumelles se pâment auprès du poète brisé qui a « bien plus mal à l’intérieur qu’en raison de ces blessures ». Luc va s’excuser (il a peur de la plainte pour discrimination sexuelle, assurément); et rentre chez-lui…. Ou l’attend Corinne. Qui le traine vers la chambre. Vous l’avez compris, marivaudage, marivaudage, on sonne à la porte. C’est Virginie qui vient s’excuser, et lui dire qu’elle le pardonne. Elle constate alors la présence à demi-nu de Corinne. Virginie, digne – mais idiote – s’en va sans un bruit.

Dis, Virginie, moi je veux bien être ton ami. Je suis un mauvais ami, mais je suis rassuré d’être des lieues au dessus du comportement des tiens. Sinon, je ne sais pas trop ce que j’ai vu, parce que bon, hein, côté scénario, il ne s’est tout de même rien passé. « Virginie accepte la domination de l’homme et pardonne à celui qui l’a trompée, alors qu’il est toujours aussi con et la trompe encore ».

Le mystère

Justine et Virginie ont acheté un micro-ondes, et Justine n’arrive pas à l’utiliser : en effet, elle se plaint qu’aucun homme n’ai pu lui installer l’appareil et lui expliquer les boutons. D’un micro-ondes. Faible femme. Déjà, moi, je l’aurais branché, c’est à ça que sert le fil bizarre qui pendouille. Mais Justine ne sait pas, ouh, là là, la technique, c’est pour les cerveaux et les hommes. Elle entasse donc les croissants dedans, et bouge deux boutons. Le micro-ondes reste inerte, tant niveau sonore que visuel. Justine gronde Virginie, car elle n’a pas pardonné à Luc. Elle se comporte comme une gamine, et elle devrait comprendre qu’un homme a des besoins et que c’est sa faute à elle, elle devrait aller s’excuser. Le micro-ondes fume alors, et en sort des croissants complètement cramés, comme l’intérieur du four. Un four avec Grill et Chaleur tournante, donc. Qui fonctionne en deux minutes, sans courant. Génial.

Luc, lui, est vraiment embêté : comprenez, il vient de perdre la femme de sa vie, Virginie. Moi je me demande toujours pourquoi il couche avec l’autre, dans ce cas. D’autant plus quand Corinne arrive et qu’il l’a rejette, alors qu’elle lui dit qu’il ne l’a pas fait hier soir dans le lit. Je… quoi? Après que Virginie vous ai surpris à la fin de l’épisode dernier, tu as quand même sorti ton pénis face au succube tentateur? Ta vie doit être compliquée, quand même, dans ton cerveau de primate. Luc jette Corinne dehors après l’avoir baffée sans raison autre qu’elle est une femme, et que donc c’est sa faute à elle, et pas à lui, et il décide de ne pas partir au travail. Mais il y va quand même, pour échapper à Corinne qui (c’est donc sous-entendu) continue à frapper à sa porte alors qu’elle vient de se faire frapper. Les femmes, ces lemmings. Bon, comment tu comptes expliquer à ton chef que ton Angine, c’est de la connerie? Et comment tu comptes lui expliquer que tu es là, mais que tu refuses de travailler? Tu…. t’en fous, et tu insultes une cliente en lui disant que tu ne lui donneras pas de cours de Tennis, que tu t’en fiches, que tu prends ton café et qu’elle est nulle? Et bien tu te fais virer.

Anthony, jamais à cours de conseil pertinent, lui suggère de s’excuser pour retrouver son travail. Luc déclare qu’il se fiche du travail, de tout, et qu’il finira SDF, et qu’il en a rien à foutre, car la seule chose qu’il avait dans sa vie, c’était Virginie. Qu’il a trompé deux fois et demi, en deux jours parce qu’elle avait vu un ami gay, donc. J’aimerais que la banque de France tienne autant à ses coffres que toi à la prunelle de tes yeux.

De son côté, Virginie accepte de recevoir les explications de Serge (Non mais sérieux, regardez cette photo. Ca hurle du côté manif-pour-tous!). Il n’a jamais touché une femme, il n’était pas intéressé par l’amour physique avec elles…. Mais pour Virginie, OK, il va le faire. Un classique « J’étais gay, mais tu m’as guéri », fantasme de toute adolescente ayant constaté la différence de raffinement entre les concours de rot et les sorties à l’Opéra. C’est bien de faire rêver son public, AB. Ils s’embrassent donc maladroitement, quand Justine et ses amis sonnent à la porte. Justine n’a toujours pas compris que c’était chez elle, apparemment. « Luc devient fou et perd son travail, c’est de ta faute, alors revient maintenant, vous êtes sensés être ensemble, arrête les conneries et excuse-toi ». MAIS ÇA NE PREND PLUS, VIRGINIE REFUSE. C’EST TELLEMENT SURPRENANT QUE C’EST UN CLIFFHANGER EN SOIT.

Le scénario de l’épisode? « Luc trompe encore Virginie, mais c’est encore sa faute à elle - Les gays n’existent pas, ils attendent la bonne femelle qui leur fera oublié la queue. ». Woaw.

Les séries AB Production

Ces trucs sont une abérration en soit. Aucun scénario, un jeu d’acteur pitoyable, aucune imagination, des situations rocambolesques, pas d’histoire, pas de dialogue… J’ai toujours eu du mal à comprendre l’intérêt que portaient les gens à ces choses. Avoir l’impression de n’avoir rien regardé, c’est terrible, à mon sens.Mais le traitement de la femme dans ces séries est la chose la plus rétrograde que j’ai vu de longue date. Ces épisodes ont été suivi par « Le miracle de l’amour » pour lequel je n’ai tenu que deux épisodes, mon repas étant terminé. Même schéma non-narratif (Épisode 1, Lalie fait une gaffe avec la peinture, Épisode 2, José a ses cheveux décolorés en blond en raison de la gaffe faite par Lalie – NÉANT TOTAL de scénario, du remplissage à peine), mais surtout, même position de la femme. Les hommes portent les charges, les femmes passent des heures dans la salle de bain, les hommes jouent, les femmes font les courses, les hommes débarrassent la peinture, les hommes font le ménage pour faire un cadeau aux femmes, pas parce que c’est normal, les femmes se lèvent avant les hommes pour faire le petit déjeuner, les femmes qui dorment plus longtemps que les hommes sont réveillés de force et engueulées…

Du sexisme? Par les femmes trentenaires en 2014? Ne cherchez pas. Je sais ou regarder pour voir ce qu’on leur a bourré dans le crâne.

Tous les matins du monde

Il est parfois étonnant de constater comme les événements peuvent se téléscoper après que tout a été calme pendant un long moment. Le res...… Lire la suite →