Ingrédients
- 8 saucisses fumées
- 4 gros oignons
- Du gingembre frais
- 12 tomates
- Un peu de curry
- Beaucoup de curcuma

Il va falloir faire un petit préambule, parce qu’ici, et maintenant, je crains pour ma vie. PARFAITEMENT.
Le rougail, c’est un sujet un petit peu épineux. Il s’agit d’une recette traditrionnelle réunionnaise, dont chaque famille a sa version. LA VRAIE. LA MEILLEURE… Mais toutes différentes. Alors je m’excuse d’avance aux trois réunionnais présents dans mes amis sur Facebook. Oui, je ne le fais pas comme vous. Non, ma recette n’est pas une recette impie qui mérite la mort d’un zoreille métropolitain bobo en manque d’exotisme… Il s’agit juste de la version de la branche réunionnaise de ma famille. Pas la peine d’envoyer les chiens, ou PIRE, vos mamans en colère !
Bon, ceci étant dit, BIEN ÉVIDEMMENT, le rougail que je vous propose est le meilleur. Non mais.
Pensez à faire tout cela la veille de la dégustation au mieux, le matin pour le soir, sinon, le midi pour le soir au pire.
Prenez donc des saucisses fumées réunionnaises. En l’absence de celles-ci, je suggère des saucisses de toulouse. Piquez-les (pas chez le charcutier, hein, leur peau, petits canailloux) — Mmm, j’interrompts ma description ici, mais franchement, canailloux c’est plus joli que canaillous, même si ça ne fait pas partie de la liste des choux genoux hiboux, non ? Bon, j’en étais où ? Ah, oui. Piquez les saucisses, et plongez-les dans de l’eau bouillante dans une belle marmite ou un joli fait-tout pendant 15 minutes. Cela permettra de désaler la saucisse si elle est fumée, et de la dégraisser dans tout les cas.

Une fois votre saucisse ébouillantée, sortez votre Barbecue, nous allons la griller. Bon, dans un appartemment versaillais, on prend un grill électrique, c’est moins drôle, mais ça crée moins de problème de voisinage. Ahhhh, les bonnes vapeurs de charbon et de graillon mêlées dans les cages d’escalier, après un réveil par alarme incendie, ça n’a pas de prix ! Vous obtiendrez au bout de quelques minutes des saucisses prêtes à mijoter !

Une fois joliement colorées, vous pouvez les retirer du grill, et nous commençons maintenant la recette la plus DIFFICILE DU MONDE. Reprenez la marmite du début dont vous avez vidé l’eau, mais que bien sûr, vous n’avez pas nettoyée, puisque vous êtes d’une feignantise absolue. Oh, et parce qu’on veut garder les saveurs libérées lors de l’ébouillantage, mais c’est la caution culinaire ça. Quand vous entendez « on veut conserver les sucs », traduisez ça par « Oh, hey, tu veux pas que je passe mon temps à la plonge, tant que tu y es ? ». Les cuisiniers sont des chaffouins. La preuve, même un rat peut cuisiner, chez Pixar. Dans cette marmite, versez un bain d’huile neutre (tournesol ou arachide), et faites-y cuire beaucoup d’oignons coupés en lamelles. Genre pour les 8 saucisses en photos (1,2 kg d’après la charcutière je crois, mais moi j’ai surtout vu le prix, j’étais pas très concentré du coup), j’ai mis 4 gros oignons jaunes, environ la moitié en poids de saucisse, quoi. Mais on s’en fiche un peu, on fait de la recette à-peu-prêtiste ou pas HEIN ?

Ne laissez pas les oignons se colorer, ils doivent juste cuire. Une fois fait, c’est SUBTIL. Balancez là-dedans la saucisse découpée préalablement en rondelles, puis un morceau de ryzome de gingembre passé au presse-aïl ou à la rape, des tomates coupées en 8 grossièrement (N’ÉMONDEZ PAS, MA BRAVE DAME !), environ la même quantité en volume que de saucisse, 10-12 tomates dans le cas présent. Recouvrez d’un peu de Curry, et de beaucoup de Safran.
ET LÀ JE VOIS LES MATHÉMATICIENS DU FOND. À 30 Euros le gramme de Safran, beaucoup de Safran, ça fait beaucoup d’argent. Mais tout le monde sait que les Réunionais sont des bourges profiteurs des allocations familiales que la douce métrop… Euh, pardon. En fait, ce qu’on appelle Safran à la réunion, c’est du Curcuma. RESPIREZ, RESPIREZ !

Laissez cuire à feu doux, au bout de quelques instants, vous aurez un début de déjutage des tomates. Vous pouvez commencer à ajuster l’assaisonnement en curcuma.
Ensuite, la partie rigolote. Plus un rougail cuit, meilleur il est. Votre travail maintenant est de faire en sorte que la tomate réduise. Pour cela, couvrez pendant le mijotage, et découvrez de temps en temps pour remuer d’une part, mais aussi laisser s’évaporer l’eau. Ensuite, il vous faut simuler des recuissons. Toutes les heures, ou heures et demi, retirez du feu et laissez refroidir (par exemple dans les couloirs de votre immeuble, ils devraient être déserts après l’alerte incendie du matin) avant de recommencer un cycle.
Après au moins 5 heures de cuisson, nous arrivons à un résultat intéressant quoique pas encore assez réduit, mais c’est le moment de rectifier une dernière fois l’assaisonnement, le gout ne variant plus beaucoup à ce moment.

Mettez à mariner dans un bol des lamelles d’oignon avec des lamelles de tomate. Vous pouvez faire un second bol avec du piment rouge également. Vous pouvez en faire un autre avec du beurre de cacahuète (salé, pas le beurre américain qui est sucré).
Faites cuire du grain (des lentilles) et du riz. Servez le tout, et voila. Vous avez fait un rougail, ou à peu près. ET BON APPÉTIT BIEN SÛR !